L'UN CONTRE L'AUTRE.
tout autour de l'amour
Sommaire
1. Le poème de nos corps
2. L'amour ne dure jamais toujours
3. Insomnie
4. Le bon vouloir
5. Baudelaire au bordel
6. La face cachée des lunes
7. Rose
8. Si d'aventure
Le poème de nos corps.
Comment trouver les mots
Pour évoquer l’émoi
Pour raconter ta peau
Rédiger nos ébats ?
Que dire après « je t’aime »
Incipit éventé
D’un insidieux poème
En rime embarrassée ?
Avec les mots du corps
Tous deux nous conjuguions
Le verbe sans effort
Alors que je t’aimions
Toi tu m’aimais en toi
À nous deux nous étions
Trois, toi, l’amour et moi
Sur un seul diapason.
Les vers, vagues promesses,
Ne sont que monologues
Tandis que les caresses
Regorgent de dialogues
Sans couper nos paroles
Unis à l’unisson
Nos cœurs en hyperbole
Parlaient sans élisions.
Syllepses, anacoluthes
Au rythme de ta chair
Prosodie de nos luttes
Croquées à fleur de nerf
Ton cœur en apostrophe
Mes poings en suspension
Tu agrafais mes strophes
Pour y rimer mon nom.
Sur tes seins, sur tes cuisses
Je lisais tes secrets
Parcourant sans ellipse
Tes phrasés alignés
Et nos mots sans censures
Alternaient rime et prose
Césures et déchirures
Jusqu’à l’apothéose
Quand nos langues déliées
Savaient, dans le silence,
S’allier puis se briser
Sur l’écueil de nos sens
Nous tissions en un jour
Des recueils infinis
En versant dans l’amour
Nos versets à l’envi
Mais je suis seul ce soir
Je gratte et persévère
Mes mots sont sans mémoire
Soliloquant je perds
Ton essence ton parfum
Ton sourire et ton cri
La paume de ta main
Qui guidait mes envies
Amour, le mot est court
Je dois le définir
L’adjectiver toujours
Je me force à décrire
Ce laborieux « je t’aime »
Je rature et m’acharne
À écrire ce poème
Qui brise tous les charmes
Avec les mots du corps
Pas besoin d’attribut
L’amour est simple et fort
Il est limpide est nu
De la main je l’écris
Dans le creux de ton dos
Et toi tu me le cries
Au revers de ma peau
Comment trouver les mots ?
Pourquoi trouver les mots ?
Je préfère éluder
Déposer ce baiser
Sur tes lèvres, y glisser
Ce texte trop exsangue
Et du bout de la langue
Te laisser l’aviver
Et notre poésie
En rimes embrasées
Sera la mélodie
De nos corps enlacés
Une œuvre d’art à deux
Dans le secret des dieux
Non, je ne t’écrirai
Jamais plus de « je t’aime »
Autre part qu’au secret
De nos doux épidermes
L'amour ne dure jamais toujours
Enlace-moi Lucille, étreignons-nous si fort
Que s'éteigne le jour, que s'éloigne l'aurore,
Retenons prisonnière la nuit entre nos corps,
Drapés d'opacité restons aveugles et sourds,
Que jamais la lumière sur ce pauvre décor
Ne dévoile l'issue du périlleux parcours,
La triste vérité qu'aucun de nous n'ignore…
L'amour ne dure jamais toujours.
Enlace-moi Lucille, étreignons-nous si fort,
Que s'annulent les ans, que s'enlise la mort,
Accrochés à nos chairs, feignons de croire encore
Aux projets insensés, aux ingénus discours,
Que d'une rose fanée un bourgeon peut éclore,
Que le désir se fige au point de non-retour,
Que le bonheur étiole les charmes du dehors…
Que l'amour peut durer toujours.
Enlace-moi Lucille, étreignons-nous si fort,
Que revienne le temps sans doute et sans remords,
Que la joie dans nos yeux maquille de feu et d'or
Les matins cafardeux et le compte à rebours
Pour nos corps érodés par le temps qui dévore
Les songes et les mensonges, les attraits, les atours,
Enlace-moi ma vie, prouve-moi que j'ai tort
Quand je dis…
L'amour ne dure jamais toujours.
version musicale, duo Inopia
INSOMNIE
Toi l’amante… Qu’il me plait de rêver tous les soirs
Qui me hantes… Jour à jour un peu plus chaque nuit
Que j’invente… Les yeux cernés sur mon cafard
Toi l’absente… Voici le fruit d’une insomnie
Je m’endors et je veux basculer vers l’oubli
Je balance mon crâne en biais sur l’oreiller
Mais pour te rappeler un souvenir suffit
Et tu viens pour drainer mon esprit dépité
Je suis lourd de sommeil, vidé, lucide encore
Je ressens ton essence, et ton ombre s’allonge
Dans ma tête en éveil, où repose mon corps
Tu t’immisces, t’insinues, et me voles les songes
Tu ressembles aux princesses muettes des journées
Aux doux prénoms des femmes que je ne peux aimer
Tu me dis les poèmes que je n’ai pas osés
Avant de faire l’amour à mes rêves inavoués
Voilà que de nouveau, on s’aime toute la nuit
Je te parle et paresse en dessinant ton corps
Tu me tues peu à peu, évasive, alanguie
Plus vive qu’un aveu, plus putain que la mort
Quand au bout de la nuit je t’ai si bien rêvée
Je peux presque frôler l’ombre de tes baisers
Tu m’embrases, enroulée de doux draps phantasmés
Et l’aurore auréole ton long corps prisonnier
Les faisceaux de l’été viennent happer ton profil
Alors, tu t’évapores dans le ciel du matin
Evanescente, absente, tu t’envoles gracile
Tu pars à la dérive et disparaît soudain
Puis, ivre de fatigue, enfin je me réveille
Je me dois de vaquer à ma vie sans envies
Tu es là, accrochée aux rayons du soleil
Je cherche à te maudire, mais toi tu m’éblouis
Oui, toi, belle insolente, qui taquine mes nuits
Toi la vile impudente qui me lâche au matin
Me tente et me tourmente, nuitamment tu me nuis
Je t’en prie ma chimère, je veux dormir enfin
Mais les jours et les nuits
Sont semblables à ce soir
Tout ressemble à l’ennui
Nuits blanches et jours blafards
LE BON VOULOIR
Depuis que je suis vieux
je ne dis plus « je t’aime »
Mais je dis « je te veux »
Comme disent les espagnols
Je te dis « te quiero »
Comprends-tu les paroles
D’un mort-la-faim, d’un gueux
D’un enfant de bohème ?
1. L’amour est bien amer / Je te veux je préfère
Et je veux te prouver / Ma bonne volonté
Mais aimer c’est douter / Aimer ça ne vaut guère
Car je ne veux que toi / Et je puis tout aimer
C’est sans doute un peu court / pour un aveu d’amour
Mais laisse-moi te dire / Jusqu’où va mon désir
Non, ce n’est pas la foi / Qui soulève les montagnes
Ni l’amour, moi je crois / Qu’c’est quand on veut qu’on gagne
Travailleur acharné / Je creuserai ce tunnel
Pour franchir ce sommet / Et t’atteindre, ma belle
Aimer c’est juste un songe / Pour consumer sa flemme
Aimer c’est un mensonge / Bon pour faire un poème
Car c’est bien inutile / D’offrir son cœur aux flammes
Car aimer c’est facile / C’est un constat de l’âme
Une marque indélébile / Tu m’aimes et c’est signé
Surtout ne rien changer / Pour éviter les drames
2. Je te fais cet aveu / Je te veux mais jamais
Je ne dirai « je t’ai » / car t’avoir c’est bien peu
Je veux vouloir toujours/ Le désir va croissant
C’est plus fort que l’amour / Je veux défier le temps
Je ne dis pas « je t’ai » / Car si je t’ai qu’aurai-je
Encore à désirer ? / Se marier, puis mourir ?
Si je t’ai que voudrai-je ? / Une plus longue laisse ?
Un chapelet de maîtresse / Pour nouer mon désir ?
C’est à l’envers qu’on dit / « je tiens à ma liberté »
Quand vient le compromis / On se laisse enchaîner
Moi, je ne suis pas libre / J’entends le devenir
Entends l’envie qui vibre / Qui ne peut s’évanouir
Je désire tant ton corps / J’en veux jusqu’à la mort
Tous deux nous serons forts / Ô ma libre compagne
Je te dis « Te quiero » / Car tu sais qu’en Espagne
Au pays de Cocagne / On bâtit des châteaux…
Baudelaire au bordel
Viens mon amant verser du vin sur mes versants
Sur ma robe de pourpre enivrée, mes seins blancs
Contre mes tempes bleues et mes lèvres de feu
Des rigoles de vin doucement peu à peu
Que la vile liqueur de ce goulot goulu
Degouline en mon cœur pour habiller le nu
De mon corps allangui et qu’il me porte aux nues
Qu'elle illumine enfin mes yeux si malheureux
Et trace sur mes joues d'oblongs sanglots de sang
Viens mon amant ma mort vibrer jusqu’à l’aurore
Vagabonder nerveusement sur mes versants
Coule coule coule
Goutelette amère
Par mes artères
Pénètre en moi
Ton corps lové dans ce cratère
Qui coule entre mes doigts
Et ma langue en lapant cette bulle de vin
Qui coule lentement de ce goulot vermeil
Noie mon âme affolée dans un enfer divin
Et grise dans ma gorge un arôme pareil
Aux beaux délires d’un Baudelaire au bordel
Cette joie langoureuse et volage serait presque
Aussi rêveuse et folle qu'une ivresse livresque
La face cachée des lunes...
Une fille
à la face
de demi lune
embrasse
et caresse
les lunes
du profil
vu de fesses
d'un jeune homme
qui tout comme
elle laisse
ses deux mains
glisser sur
les courbures
du derrière
de la fille
que notre oeil
déshabille
à l'envers
de la feuille
au revers
du dessin...
C'est vrai qu'on ne voit pas
très bien la demoiselle,
mais n'est-ce donc pas ça
qui la rend si sensuelle ?
Vous n'êtes pas convaincus ?
Vous auriez préféré
Apercevoir son cul?
Désolé...
Je comprends...
Mais si vous savez voir
au delà de vos yeux
écoutez donc l'histoire
de ces deux amoureux
Deux amants éblouis
l'un blotti contre l'une
Tournent et dansent en silence
Tout autour de la lune
Et au fur à mesure
De leur danse transie
Leur amour va croissant
Ils s'enfuient ils s'oublient
Ils sont nus, révolus
Dans l'espace infini
Il n'y a plus de trace
De peurs, d'apesenteur
Et plus de gravité
Et leurs corps éthérés
se dévorent,
s'évaporent
Ils s'enlacent si fort
Qu'ils ne forment qu'un être
Ils s'aimeront encore
Jusqu'à ce que l'aurore
Les fasse disparaître
Et vous qui savez voir
Au-delà de vos yeux
Les nuits de lune noire
Cherchez donc dans les cieux
Un météore absent
L'étoiles des deux amants
Ceux là qui décidèrent
D'étreindre la lumière
Pour jouir à tout jamais
Rose.
Rose est ton pubis
Ephémère et novice
Un bourgeon cicatrice
Dans le verger des vices
Rose est ton pubis
Auréolé d’épines
De boutons clitoris
Que ma verge égratigne
Rose est ton pubis
Aux délicats pétales
Effeuillés en pagaille
Effleurés en délice
Rose est ton pubis
Irisée de rosée
Fleur duveteuse et lisse
Qui se laisse arroser
Rose est ton pubis
Mais attends donc la belle
Jolie rose pucelle
Attends que je m’y glisse
Et tu verras comment
Cette fleur de pubis
Rougira à l’instant
Quand coulera le sang
SI D’AVENTURE
Le vampire de l’amour
Sème la mort sûre sur son parcours
C’est le poison sous l’épiderme
Le démon craché dans le sperme
Ton vagin devient calice
Calice à venin
Auréolé d’épines
Qui m’égratigne
Et mon pénis te le rend bien
Comme un canif qui t’assassine
Si d’a… venture tu la mets pas
Si t’aimes sauter sans élastique
Si d’ha… bitude c’est cas par cas
Si c’est le risque qui t’excite
Tu m’auras deux fois dans la peau
Si d’aventure j’suis séropo
Tu f’ras pas d’vieux os tu verras
Si d’aventure j’ai le sida
Je te dis ça, tu récidives
Hey ! Rendez-vous sur l’autre rive
En espérant que dans l’au-delà
On aura guéri le SIDA !